Mon enfant,ma sœur,
Songe à la douceur
Songe à la douceur
D’aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes
Brillant à travers leurs larmes
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Luxe, calme et volupté.
Des meubles luisants,
Polis par les ans,
Décoreraient notre chambre;
Les plus rares fleurs
Polis par les ans,
Décoreraient notre chambre;
Les plus rares fleurs
Mêlant leurs odeurs
Aux vagues senteurs de l'ambre,
Les riches plafonds,
Les miroirs profonds
Aux vagues senteurs de l'ambre,
Les riches plafonds,
Les miroirs profonds
La splendeur orientale,
Tout y parlerait
À l'âme en secret
Sa douce langue natale.
Tout y parlerait
À l'âme en secret
Sa douce langue natale.
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Luxe, calme et volupté.
Vois sur ces canaux
Dormir ces vaiseaux
Dont l'humeur est vagabonde;
C'est pour assouvir
Dormir ces vaiseaux
Dont l'humeur est vagabonde;
C'est pour assouvir
Ton moindre désir
Qu'ils viennent du bout du monde.
Les soleils couchants
Revêtent les champs,
Qu'ils viennent du bout du monde.
Les soleils couchants
Revêtent les champs,
Les canaux, la ville entière,
D'hyacinthe et d'or;
Le monde s'endort
Dans une chaude lumière.
D'hyacinthe et d'or;
Le monde s'endort
Dans une chaude lumière.
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Luxe, calme et volupté.
Charles Baudelaire
